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Interview : José Garcia “Ma drogue, c’est la complexité, les défis”

En attendant l’Astérix de Guillaume Canet, le comédien de 56 ans met de côté la comédie pour se glisser dans le personnage principal du sinueux Le Torrent d’Anne Le Ny. Edgar en parle avec l’épatant José Garcia.

Alexandre (José Garcia) et sa jeune et belle épouse Juliette (Ophélia Kolb) : une femme va bientôt disparaître.

Après quelques années passées au rythme (plaisant) d’une comédie annuelle, vous semblez retrouver votre appétit de travail. Le Torrent marque-t-il un tournant dans votre carrière ?
J’ai toujours les mêmes envies de tourner. Le seul problème est de trouver des projets originaux, inédits, avec une distribution qui attise réellement ma curiosité. C’est une configuration particulière, qui vient par vagues. Il arrive parfois que vous n’ayez rien à vous mettre sous la dent. Et à d’autres moments, les choses vont mieux. C’est ce que je vis actuellement.

Avec l’âge, devient-on plus exigeant ?
Ce n’est pas tant au niveau de l’exigence, mais j’aime les challenges. Pour ce qui est de la maturité, il est vrai que je ressens aujourd’hui une véritable attirance pour les sujets plus sombres, plus durs ou intenses. Avec la comédie, ça devient rare de tomber sur une proposition vraiment délirante. Et puis, c’est un genre qui doit savoir contenter beaucoup de monde… Difficile de tomber sur un scénario qui soit vraiment bien fichu.

Et il y a eu aussi la télévision…
Oui, j’ai eu la chance de tourner Totems. Ça a pris pas mal de place dans mon emploi du temps. J’ai alors essayé de composer entre Amazon Prime et le cinéma. Et puis la guerre est arrivée en Ukraine. Nous avions cinq acteurs russes avec nous. Nous avons dû arrêter.

Alexandre (José Garcia) et sa fille Lison (Capucine Valarmy) bientôt pris dans l’engrenage du mensonge et de l’omission…

Triste ?
Oui ! J’adorais mon personnage, un type bourré de crevasses, d’écueils, qui savait très bien faire la guerre et pratiquer l’espionnage. Mais qui n’avait que ça dans son existence. J’aurais bien aimé pouvoir le développer plus encore.

Avec Le Torrent, vous revenez un peu à l’époque du Régis Wargnier de Pars vite et reviens tard...
Anne Le Ny a sa propre obsession, comme souvent les réalisateurs. Elle, ce sont les rapports humains. Elle montre l’âme humaine au plus près de ce qu’elle est dans la réalité. Ces traitements sont toujours surprenants. C’est ce qui m’a plu dans Le Torrent. Alexandre, mon personnage, est dans la réussite. Il a une fille – campée par Capucine Valmary qui est extrordinaire – née d’un premier mariage. Sa nouvelle femme disparaît et il va essayer de sauver les apparences. C’est un homme qui a l’habitude de réussir, de se réaliser dans son entreprise. Mais il est plus complexe que ce qu’on peut imaginer. Suite à un accident, il enferme sa fille dans une forme de chantage affectif et va l’entraîner, avec le reste de sa famille, dans tout un mécanisme sinueux pour tenter de sauver ce qu’il a construit.

Avez-vous de l’empathie pour cet Alexandre ?
Anne Le Ny est venue me chercher pour les mêmes raisons que Costa-Gavras à l’époque du film Le Couperet. Elle avait besoin elle-même d’un acteur qui provoque de l’empathie chez les spectateurs. J’ai beaucoup travaillé sur la peur. Alexandre a du mal à réaliser ce qui lui tombe dessus. Et soudain tout s’emmêle : c’est un homme trompé, bafoué, sa femme a disparu, sa famille le suspecte, sa réussite est ébranlée. Il est dans une toute-puissance qui lui fait oublier ce que peuvent ressentir ses proches. Sa fille en premier, qu’il a mis un peu de côté. Elle n’a jamais été au centre de quoi que ce soit et voilà qu’elle devient son seul alibi…

Un face-à-face au sommet avec André Dussollier : “Au choix, une joute formidable ou des moments de tango.”

Outre Capucine Valmary qui joue donc votre fille, il y a aussi André Dussollier dans la peau de votre beau-père…
Quel pied ! J’avais déjà eu la chance d’avoir joué avec lui dans A fond en 2016. Il tournait sur le toit de la voiture en se prenant pour Belmondo. C’était vraiment dément. Et là, nous nous retrouvons sur des rôles aux antipodes. Ce qui est agréable avec lui, c’est son côté Stradivarius de l’acteur. Au choix, une joute formidable ou des moments de tango.

Pouvez-vous vous autoriser quelques mots sur Astérix et Obélix : L’Empire du milieu de Guillaume Canet à sortir le 1er février 2023 ?
Pas vraiment puisque je ne l’ai pas vu. Tout ce que je peux dire, c’est que ça a été un moment de tournage extraordinaire. Guillaume a été dément et d’une réactivité hors du commun. Il n’a pas ménagé sa peine. Ce film, ça a été un sacré barnum à tourner ! Je pense que ça va être grand, beau et cinématographiquement très racé.

Quelles sont vos attentes aujourd’hui en tant que comédien ?
Des grands rôles. J’ai souvent été gâté. Et j’ai encore envie de rôles épais. Je suis comme un junkie. Ma drogue, c’est la complexité, les défis. Maintenant, c’est le moment pour moi d’aborder des sujets plus profonds.

Le Torrent d’Anne Le Ny avec José Garcia, Capucine Valmary, André Dussollier… Sortie le 30 novembre.

Photos : Emmanuelle Jacobson-Roques