
Fournisseur officiel de la Cérémonie des Césars, ce Château d’appellation Pessac-Léognan livre des vins élégants et subtils au nez complexe. Situé au carrefour de plusieurs ensembles géologiques offrant des terroirs variés, ce domaine appartenant à la maison Dourthe depuis 1990 est un écrin pour tout amateur de vins curieux qui se respecte. EDGAR a répondu à l’invitation le temps d’une nuitée sur place !
Direction Martillac à trente minutes de Bordeaux, pour découvrir ce Château emblématique de la Maison Dourthe (qui a accueilli en 2025 quelques 2980 professionnels et particuliers) dont on a entendu le plus grand bien lors de diners parisiens réunissant passionnés et professionnels du vin soulignant la qualité de ces flacons doués d’un très bel équilibre et pouvant s’apprécier dans leur première jeunesse. Pour comprendre la personnalité de ce vignoble s’épanouissant sur cette propriété de 54 hectares (48 ha en rouge et 6 ha en blanc), il faut avant tout se projeter mentalement à 50 mètres d’altitude sur ce fascinant plateau de Graves qui incarne le point dit culminant de l’appellation. C’est sans doute la meilleure manière d’éprouver la fabuleuse diversité qui règne ici et confère à ces vins intenses ces robes profondes, presque noires et ces nez addictifs de mûre et bigarreau aux notes fumées. Il y a ici comme une forme de symbiose sur ce cru d’un seul tenant (certifié HVE3) sur des sols de graves, de calcaires et d’argile. Sur le versant des blancs, on admire ces reflets jaune pâle tirant sur le vert lumineux sous une expression aromatique du sauvignon sublimé par de délicieuses caresses végétales. On aime ce « punch » grisant au palais. On retrouve parfois ces parfums délicats de buis et de fleurs blanches évoluant dans un boisé particulièrement bien dosé. Si le cépage Sémillon ici n’est présent qu’à moins de 10% dans les assemblages du Château La Garde blanc, en revanche le Sauvignon blanc est roi, car les sols et sous-sols sont traversés par une veine calcaire caractéristique. Il compose à ce titre 90% des assemblages du vin blanc.
C’est ce que les amateurs de grands vins « de plaisir » recherchent désormais, ce caractère « drinkable » avec de la soie discrète aux papilles mais aussi une grande fraîcheur. On observe ces vignes remembrées et en partie replantées donnant naissance à des vins possédant un vrai potentiel de garde. Ce vaste vignoble, propriété de la Maison Dourthe (achetée par le famille Thiénot en 2007) fascine. Il suffit de contempler sa ravissante chartreuse du XVIIIe siècle pour céder à la magie des lieux. La Château La Garde porte en lui deux siècles et demi d’histoire et les experts s’accordent à dire que ses croupes de Graves figurent parmi les plus belles de Pessac-Léognan. La lutte raisonnée permet de produire des raisins sains sans recourir aux produits chimiques et pesticides. Cette ode à la nature est constitutive de la philosophie-maison. Rien n’est laissé au hasard pour produire de très beaux raisins. L’attention portée à chacune des parcelle et les vendanges manuelles soulignent la volonté de défendre une viticulture raisonnée. Les lots bonifiés en barriques permettent de révéler ces séduisants bouquets fruités d’agrumes, de fruits exotiques mais aussi cette olfaction de très grande tenue avec ses touches de cédrat ou encore de litchi. On retrouve, de temps en temps, ces doux souvenirs vanillés correspondant aux passages en fûts durant 10 mois. On a la puissance mais aussi la souplesse en bouche et c’est fort plaisant. A travers des études pédologiques récentes, la propriété a identifié 27 types de sols distincts. C’est dire le caractère atypique de ce terroir. Chaque cépage a son sol de prédilection nous dit-on lors de notre visite. On navigue nonchalamment à proximité de l’étang, de la forêt, des parcelles au repos et du verger en faisant à haute voix le lien entre cépage et sols. Ce temps de la promenade nous renseigne autant qu’il nous revigore.
Un contexte hautement vertueux d’une viticulture raisonnée.
On constate que le cabernet-sauvignon prospère sur le plateau de graves profondes et que le petit verdot exprime un développement radieux dans ce contexte hautement vertueux. Après un passage par le cuvier portant la signature du cabinet d’architecture Moon Safari, la brillante Directrice Générale et winemaker de Maison Dourthe, Pénélope Godefroy souligne les bonnes pratiques revendiquées sur le domaine : « Nous avions depuis de nombreuses années l’intuition qu’il se passe sur cette propriété quelque chose de spécial, avec une nature particulièrement foisonnante ». En effet, pas moins de 56 espèces d’oiseaux différentes (dont 17 espèces considérées comme patrimoniales par leur statut de rareté) ont été observées ici. Ingénieure agronome et œnologue de formation, cette personnalité du monde du vin s’appuie sur un riche parcours : elle a travaillé onze ans au sein du groupe Artémis Domaines (Château Latour à Bordeaux, Domaine d’Eugénie en Bourgogne, Château Grillet dans la Vallée du Rhône, puis en tant que Directrice technique de trois châteaux du même groupe sur la rive droite : Siaurac, Le Prieuré et Vray Croix de Gay. L’année dernière, elle a travaillé chez Château d’Yquem sur la stratégie RSE (Responsabilité Sociétale ou Sociale des Entreprises). Elle peaufinera sa pratique et sa vision également à l’étranger tant en Italie qu’en Nouvelle-Zélande. Désormais, c’est aux cotés de Valentin Jestin, Directeur Général Adjoint, qu’elle montre que Bordeaux, sous les meilleurs auspices, se réinvente au quotidien. C’est par le biais de ce travail intra-parcellaire rigoureux et l’usage de cuves inox de petites capacités, à double peau isolée, que ce vibrant Château, parvient à produire une si riche palette de vins identitaires sur de beaux volumes de 200.000 bouteilles (France et Export).
Ces derniers, parfois nerveux ou tout en finesse (dans des nuances se situant, sur certains millésimes, entre le chèvrefeuille et la fougère) régalent les amateurs de nectars concentrés en bouche et dont les robes pourpre intense laissent deviner le cassis et la mûre avec une subtile pointe de poivron rouge. Les fins connaisseurs, à l’âme d’historiens, souligneront l’existence d’un « Bourdieu de Lagarde » très apprécié au XVIII ème siècle déjà dont on reconnaissait la bonne et généreuse « matière ». A cette époque ce n’était pas encore un château viticole, seulement une ferme (appelée « Bourdieu » en patois bordelais) avec des vignes autour. Le lieu-dit s’appelait « La Garde ». Puis, en devenant un vrai château viticole au 19e siècle, la ferme a pris le nom du lieu-dit, devenant le « Clos La Garde ». Après avoir quitté le nouveau chai (dans le prolongement du chai historique de 1881) avec ses vastes façades vitrées, on passe à la dégustation qui livre tout le caractère singulier de ces vins aux tannins veloutés, avec un délicieux charnu en milieu de bouche, et une finale longue et précise. « Ce chai inauguré en 2021 n’est pas qu’un outil, c’est un lieu qui respire, qui inspire ; un espace où la technique et la sensibilité s’accordent pour façonner un grand vin.» précise Pénélope. Et d’ajouter : « En découvrant La Garde, j’ai compris qu’ici, rien ne s’impose : ce terroir, mosaïque rare de vingt-sept sols, se gagne jour après jour, par l’observation, l’humilité et la précision collective ».
Cette pensée, au coeur de ce théâtre de nature au spectacle panoramique saisissant résume, à elle seule, l’exigence et l’amour que porte la Maison Dourthe à ce terroir avec pour seuls mots d’ordre : la quête constante de justesse et le respect de l’équilibre naturel de la vigne. Cette dynamique d’excellence durable, dont Pierre Estorge, oenologue-agronome et chef d’exploitation éclairé porte aujourd’hui ses fruits. Nous passerons une nuit sereine et enveloppante dans l’une des trois chambres d’hôtes (comprenant la Suite Mosaïc, la Suite Terrasse et la Chambre Grandeur Nature allant de 190€ la chambre en basse saison à 290€ la suite en haute saison) après un diner mémorable concocté par la responsable de Dourthe Hospitalité Claire Ballarin avec les chefs Romain Abrivard&Aurélien Mallia. Un instant de suspendu de convivialité et de raffinement, en très belle compagnie, comme les aime EDGAR en déplacement !
Infos pratiques :
Créée en 1880, la Maison Dourthe est un acteur engagé de Bordeaux. Dans ses vignobles ou avec ses partenaires, son ambition est de faire découvrir la richesse et la diversité des terroirs bordelais et créer les vins de Bordeaux de demain. Son engagement s’établit autour de Châteaux iconiques : Château Le Boscq, Château La Garde, Château Grand Barrail Lamarzelle Figeac, Château Belgrave, Château Rahoul, Château Reysson, Château Pey Latour, Château de Ricaud.

Journaliste spécialisé en art contemporain, Clément Sauvoy est également commissaire d’exposition et collectionneur.
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