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Le Baudelaire : la signature végétale d’Anthony Denon

L’expérience culinaire que livre ce jeune chef étoilé à la table de l’hôtel cinq étoiles Le Burgundy Paris est centrée sur le travail du légume. Une table où l’audace ne fait pas défaut !

Connu pour son approche vertueuse marquée par le bio, le zéro déchet et le végétal, le chef Anthony Denon (succédant à Guillaume Goupil) s’empare des fourneaux de cet établissement parisien à deux pas de Madeleine avec pour priorité : pousser le produit dans ses retranchements en créant des alliances ciselées de l’instant. Passé par la belle table de l’Auberge du Jeu de Paume à Chantilly (où il reçoit en 2020 sa première étoile au Guide Michelin), cet épicurien discret célèbre la nature dans l’assiette à travers ses cycles et fait de cette citation d’Alain Chapel son mantra : « La cuisine, c’est beaucoup plus que des recettes… ». Creusant les secrets de la physionomie du goût auprès de ses quatre mentors (Alain Ducasse, Jean-François Piège, Antoine Westermann et Christophe Saintagne), il défend une cuisine aiguisée qui réconforte et répond à la logique du « manger intelligemment ».

 

Ses entrées délicates et ses plats francs font appel à des ingrédients du quotidien rappelant l’engagement d’un anti-gaspillage acceptant la remise en question. On part à la découverte de cette cuisine inventive, mettant au diapason textures et saveurs, avec au préalable deux entrées croisées : « Le végétal marin » faisant chanter salicorne et fleurs, bonite fumée et oursin. L’émotion en bouche se fait immédiate. En écho, le deuxième entrée de « La ferme », jouant subtilement de son vin chaud, foie gras et tamarin, nous dit que le chef compose ses menus au gré du marché et qu’il n’oublie jamais ni le goût ni la générosité. L’étape suivante des plats nous conduit immanquablement vers la surprenante « La plongée » orchestrée avec son étonnant chou-fleur brioché, sa Saint Jacques et curry. La qualité des produits, magnifiés sans être dénaturés, se charge de susciter ce sentiment sincère de volupté en bouche.

Le respect scrupuleux du produit.

S’effaçant devant ses petits producteurs, les exigeants artisans et ses fidèles fournisseurs, Anthony Denon peut faire confiance à son brillant chef sommelier Lucas Moles-Zahonero de 25 ans qui, sur l’accord mets et vins, nous livre un sublime Domaine FL Savennières Chamboureau 2017, un exquis Saint-Aubin Le Charmois 1er crû 2016 et un ravissant Cheveu d’Ange Mas d’Arcaÿ floral aux notes fumées. Quand arrive le très attendu plat signature « L’expérience », notre homme éclairé associera un fabuleux Aigle Royal de Gérard Bertrand en 2019 et le Grand Vin de Château de Pommard en 2012 qui accompagnera lui en beauté le merveilleux Pigeon de Pornic à la Royale sous Betterave comme une tatin. L’assiette aérienne en majesté mise sur la légèreté et dans le respect scrupuleux du bon produit. Cette dernière est par ailleurs soutenue dans un service impeccable sous l’égide du 1er maître d’hôtel Pierre Guiglielmoni qui contribue à parfaire ce moment divin.

L’instant du dessert nous conduit à faire l’expérience inoubliables des deux créations du chef pâtissier exécutif Pierre-Jean Quinonero (Originaire d’Auvergne, le jeune prodige passé par le Georges V, le Negresco, le Cinq et le Louis XV a obtenu en 2021 le titre de Champion de France du Dessert ) dans les codes de la modernité. Le moment gourmand est à la hauteur des espérances avec le bien nommé « Fraîcheur » qui excelle dans la partition suivante : pamplemousse rose, citron noir et poivre de Timut. On boucle la sérénade sucrée avec l’ultime « Signature » qui fait l’union du chocolat Itakuja, de l’oabika et de la cardamone noire. Une ode à la finesse des idées et à l’amour à souhaits mêlant moelleux et croquant dans un onctueux voyage sous le signe d’un plaisir immodéré. Au sortir de cette adresse parisienne de choix, on salue la philosophie éclairée de cette carte alléchante de très belle facture où l’exécution méticuleuse est parfaitement maîtrisée au cordeau. Et où le chef, engagé corps et âme pour livrer des cuissons justes, ne perd pas de vue l’essentiel : donner du plaisir dans le cadre des saisons. Du grand art !

www.lebaudelaire.com