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Nobuyuki Akishige, raffinement naturel

Comète dans la galaxie des « bistros-gastros », cet étoilé du Michelin répond à quatre commandements : belle cuisson, subtil dressage, juste assaisonnement et finesse du produit. Une adresse qui sort du lot en fusionnant plaisir, sensibilité et rigueur. On y court !

Une furieuse envie de saveurs, d’arômes et de dépaysement ? Alors, direction le 11ème arrondissement (berceau des vins nature à Paris) et son vibrant boulevard Richard Lenoir accueillant cette table détonante qui fait aujourd’hui saliver toute une génération de gourmets en quête d’adresses où l’on envoie des assiettes pétries de gourmandise et où l’on se régale de bout en bout dans une spontanéité née d’un travail d’équipe affûté et décontracté. A notre arrivée, l’accueil sans chichi est au rendez-vous. Le décor qui est celui d’une brasserie parisienne ne paie pas de mine. Rien ne vient distraire la rétine. Lola, jeune chef de rang, nous reçoit avec la plus généreuse et sincère des simplicités. Tout ce que l’on aime. Pour nous, le chef au pedigree impressionnant (passé notamment par l’Atelier du peintre à Colmar, la Vague d’Or à St-Tropez avec Arnaud Donckele, le K2 à Courchevel, la Pyramide à Vienne…) décide de croiser, en fonction de l’arrivage du jour, deux menus 5 et 7 étapes pour constituer un accord Mets&Vins exclusif en sur-mesure. Que dire de mieux.

On entre dans le bal avec une ravissante jardinière de légumes parfaitement ficelée faisant converser crème d’étrille et caviar osciètre. Une assiette pleine de peps toute en fraîcheur et finesse qui nous ouvre l’appétit dans une joyeuse allégresse. Survient ensuite l’élégante tartelette de foie gras et son moût de raisin et pain d’épices. Ce moment de tendresse nous renseigne sur l’esprit hédoniste qui règne dans les fourneaux et qui rend hommage aux trésors du terroir. La progression gustative, dans cette salle pleine de l’enthousiasme des clients, est fluide et nourrie de beaux échanges. C’est cela aussi une dégustation réussie : quelques mots au débotté, du partage, l’élan du cœur. On nous annonce alors le flamboyant minestrone à la truffe d’été, pomme de terre et basilic. Quelle émotion ! Nous avons dans l’assiette les meilleurs produits du marché et notre pensée va alors tout droit vers tous les petits producteurs et éleveurs de l’hexagone. Le tandem de sommeliers, constitué par Loïc et Ulysse, est intarissable sur ses flacons. Après un riesling 2013 solaire du célèbre Domaine Clé de Sol à l’équilibre parfait (sapidité, salinité et minéralité), le duo nous propose dans la foulée un 100% chenins blancs du Domaine des Pierres Bleues Stéphane Rocher venu du sud de Savennières. On garde la mâche du chenin et conserve l’acidité de la peau autour de la pomme Granny Smith. Etourdissant. Tout va au mieux. Le Domaine des Huards, nous projette lui, quelques verres plus loin, en orbite avec un 100% romorantin sec au somptueux caractère végétal de tilleul.

Une cuisine qui chante les saisons.

Une petite merveille sort tout juste des cuisines. Ce sera le très chic et soigné Saint-Pierre escorté par son céleri rave, son kumquat et esprit bouillabaisse. Une bénédiction. Le plat surprenant chante les saisons, on passe un excellent moment et on se régale car les produits sont irréprochables et le verbe des sommeliers bat son plein. On attend, sans trop le montrer, ce plat étincelant signature de la maison qui nous enchante déjà. Il s’agit du légendaire ris de veau doré, fricassé de girolles et homard et reine claude. L’explosion de saveurs en bouche et le fondant nous donnent la preuve que le chef cultive en diable une philosophie judicieuse centrée sur le produit. C’est pourquoi la salle ne désemplit pas. Le service franc, de la part d’une équipe fort sympathique, est simplement réconfortant tout en nous indiquant avec discrétion ce qui se trame en cuisine.

Coté cave, on est encore sous l’empire d’un 100% chardonnay aux notes clivantes de noix en amertume et curry vert venues des marnes blanches crayeuses au nord d’Arbois. De l’élevage en fûts de chêne, on a l’ossature du bois sans le goût. Le vin suivant, un très agréable parcellaire des Pyrénées Orientales nous ravit par son amplitude jusqu’à l’éblouissement d’un St Joseph 100 Syrah élevé en barrique 4 vins aux arômes éclatants de camphre, de violette légèrement olive et variétales. C’est brillant sur toute la ligne. Sur l’instant sucré, revenant de coutume aux desserts, on réalise que la légèreté ne fait pas défaut avec un magnifique blanc-manger à l’estragon, un renversant coulis de citron et un exquis sorbet huile d’olive. C’est engageant et divin. Les cuisines sont toujours en ébullition et la note finale se fera sur la bouleversante figue noire de Solliès, framboise, pistache et crème crue vanillée. Autant dire diabolique. Au sortir de cette adresse chaleureuse et étoilée en 2019, on se dit que la cuisine du chef en est le parfait corollaire : cette table nous régale avec ses préparations réalisées avec le plus grand soin dans une probité sans pareille !

www.automne-akishige.com