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Grégory Fitoussi : « Comme un mercenaire »

Réaliste et passionné, le comédien confirmé par la série Engrenages n’en finit pas de tourner. A l’aise en France comme à l’étranger, Grégory Fitoussi a même trouvé sa place dans l’ultime saison de Peaky Blinders. Rencontre avec un artiste au parcours international.

Vous avez pour habitude de travailler sur différents projets. Quelle est votre actualité la plus brûlante ?

Il y a beaucoup de choses qui vont bientôt être diffusées. En l’occurrence, il y a Pilote, pour OCS, un unitaire avec Hugo Becker dans le rôle principal. J’y fais une participation mais j’ai beaucoup aimé le concept : ce sont des comédiens qui portent la caméra, qui se filment, en temps réel. C’est très particulier. J’ai tourné aussi The Reunion adapté du roman La Jeune fille et la nuit de Guillaume Musso. Un 6 x 52 minutes tourné en anglais et en français. Plus récemment, c’est une série pour TF1, Walkyries, un polar avec Hélène de Fougerolles et Tchéky Karyo. Et puis, il y a la dernière saison de Peaky Blinders dans laquelle je joue et qui sera diffusée début juin sur Netflix.

Comment se retrouve-t-on sur Peaky Blinders ?

Déjà, on espère beaucoup s’y retrouver ! (Rires) Je suis un grand fan de la série. Je rêvais d’en être. Il s’avère que j’avais déjà tourné avec Anthony Byrne, le réalisateur de cette dernière saison et de la saison précédente, une série anglaise qui s’intitulait Mr Selfridge. Nous étions restés en contact, assez copains. Il s’est trouvé qu’il y avait un personnage français qui intervenait dans la saison 6 et il a pensé à moi. Ma première réponse a été de lui dire que j’aurais pu venir simplement ouvrir une porte dans Peaky Blinders tellement j’aime cette série. Il m’a proposé beaucoup mieux : c’est un rôle extraordinaire. Il m’a été offert. Un vrai cadeau.

« J’admirais Cillian Murphy avant le tournage et je l’admire plus encore désormais. »

 

Quelques mots sur Cillian Murphy comme partenaire à l’écran ?

Je n’ai pratiquement que des scènes avec lui. C’est un acteur très élégant sur le plateau comme à l’extérieur. Quelqu’un de très calme, de très investi. Très à l’écoute aussi. Je me suis senti la liberté de proposer des choses en tournant avec lui. C’est un acteur exceptionnel. Typiquement le genre d’acteur à qui j’aimerais ressembler. Je l’admirais avant le tournage et je l’admire plus encore désormais.

Vous voyez-vous vieillir comédien ?

Je ne me vois pas devenir autre chose en tout cas ! (Rires) J’espère que ça va continuer… J’ai quand même 45 ans. C’est vrai que changer de métier, ça me ferait bizarre. Et puis, je l’aime tellement que ça me rendrait très malheureux.

GI Joe, World War Z… Travaille-t-on mieux à l’étranger?

La différence majeure, c’est la langue. Je trouve ça très amusant de jouer en anglais. J’avais un peu de mal quand j’ai commencé, mais ça me plaît de plus en plus aujourd’hui. Il y a un travail plus important sur les textes, avec des coachs… Mais j’aime ça, changer, bouger, aller tourner à l’étranger. C’est ainsi que j’envisage mon métier : comme un mercenaire. J’arrive sur un plateau, je crée ma partition. Une fois le travail terminé, je pars vers un autre projet. C’est pour moi une réalité. Ce qui, évidemment, n’empêche pas de s’investir dans ce qu’on fait. Ça m’octroie une liberté que je n’aurais pas eue si j’étais resté seulement en France.

« Je continue à considérer Engrenages comme une des meilleures séries françaises jamais tournées. »

 

Techniquement, voyez-vous une différence majeure ?

Tout dépend du projet. C’est vrai que lorsque vous vous retrouvez sur une production comme World War Z, avec un budget, je crois, de 250 millions de dollars, c’est un autre monde. Vous n’avez rien de comparable en France. Sur le coup, ça peut être très impressionnant, mais, une fois que vous y êtes, face aux autres comédiens, vous prenez le pli et vous faites votre travail. Pour Peaky Blinders, je n’ai jamais vu une série se tourner avec autant d’exigence. Pour vous citer un exemple, je joue un marin. Je me suis renseigné et j’ai vu que la plupart des marins à l’époque étaient grossièrement tatoués. Des tatouages faits en prison ou en mer par d’autres marins ivres. J’en ai parlé à la maquilleuse. Arrivée sur le tournage, elle avait fait fabriquer quatre plaquettes de tatouages en suivant absolument ce que je lui avais proposé. J’étais bluffé. Tout est précis, crédible, incroyablement détaillé. Tout le monde à son poste essaye de faire de son mieux. Ce qui, ailleurs, n’est pas toujours le cas.

Vous avez toujours eu la bougeotte finalement en tant que comédien…

J’ai commencé avec un programme qui s’appelait Sous le soleil. J’ai vite compris, par la force des choses, que ça allait entraver mon parcours. Je ne connaissais pas d’acteur, autour de moi, qui avait fait ce genre de sitcoms et qui, ensuite, poursuivait une carrière fulgurante. Comme je ne voulais pas changer de métier, je me suis dit que travailler l’anglais serait quelque chose de potentiellement utile. Et j’ai donc beaucoup bossé. Et puis, j’aime bien être déséquilibré. C’est pour ça que j’avais décidé d’arrêter Engrenages. Je n’aime pas être trop à l’aise dans mes baskets. Je préfère aller à la rencontre de gens et d’univers différents.

Sous le soleil vous avait-il d’office étiqueté ?

C’était une chance d’abord de pouvoir travailler. De toute façon, lorsque vous êtes artiste, acteur, chanteur, vous êtes toujours plus ou moins étiqueté. C’est lié à vos premiers succès, à ce qui vous a révélé. Sous le soleil, des gens que je croise m’en parle encore aujourd’hui dans la rue. C’est un état de fait. Mais, depuis, je suis apparu dans pas mal de choses. La page est tournée depuis bien longtemps pour moi.

Et Engrenages, vous en parle-t-on encore souvent ?

C’est l’expérience qui m’a crédibilisé réellement. C’était un rôle extrêmement bien écrit. Avec des acteurs extraordinaires pour m’entourer. J’ai l’impression que c’est à ce moment-là qu’on a commencé à me regarder comme un acteur dans le métier. Je continue à considérer Engrenages comme une des meilleures séries françaises jamais tournées. Avec Le Bureau des légendes. Et j’ai eu la chance des faire de faire les deux !

Photos © Guillaume Plas / Tod’s