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Dan Margules, l’art du « twist » chez Schott

Personnalité du monde de la mode et garant de l’image de cette marque iconique, incarnant à elle seule un siècle de culture américaine, cette tête chercheuse passée maître en collaborations stylistiques de prestige, a répondu aux questions d’EDGAR :

Votre parcours ?

Avant de prendre le chemin de la marque Schott NYC Europe, j’ai testé plusieurs environnements avec notamment un passage au sein de la rédaction d’un webzine fait par les jeunes et adressé aux jeunes (Twenty Magazine) et j’ai également été l’assistant de Jean-Charles Leuvrey au sein de la webradio qu’il a fondé, Hotel Radio Paris. J’ai ensuite intégré l’équipe Marketing de la marque Schott NYC et c’était censé durer seulement quelques mois. Mais j’ai immédiatement été force de proposition, ce qui a amené ma direction à me conserver et l’histoire dure depuis 8 ans !

Quelques mots, peut-être, sur les origines de cette marque iconique à l’origine du blouson motard Perfecto® notamment.

Schott c’est une histoire new-yorkaise née en 1913. Irving et Jack Schott ouvrent un petit atelier à Manhattan et fabriquent des manteaux fonctionnels. C’est en 1928 que le premier blouson motard Perfecto® voit le jour – une révolution : premier blouson zippé en cuir, adopté par les bikers puis immortalisé par Marlon Brando dans The Wild One (1953) ou James Dean. Légende américaine, la marque Schott a toujours su traduire dans ses collections les valeurs fondatrices de l’Amérique : esprit pionnier, audace, créativité et vitalité. La marque est notamment à l’origine du développement d’innombrables autres icônes (cabans, doudounes, bombers …).

Depuis les débuts 1913, le style dicte la philosophie de la marque.

Je confirme. Depuis plus de 110 ans, Schott n’est pas qu’une marque de vêtements : c’est un langage. Le style est pensé comme une attitude, une manière de s’affirmer. Le Perfecto® a été porté par les bikers, les punks, les rockeurs, puis les créateurs de mode. On le voit même apparaître de plus en plus dans un univers plus urbain. Il est devenu uniforme culturel, pas seulement vestimentaire. Et on peut en dire de même pour les bombers, les parkas, les flight jackets… Le style Schott, c’est l’idée qu’un blouson en dit parfois autant sur toi que tes propres paroles.

La culture américaine et militaire font partie de l’essence de Schott.

C’est exact. Dans les années 40, une nouvelle génération d’avions militaires nécessite la mise au point de blousons adaptés aux nouveaux cockpits : le Bombers nylon est né, léger, chaud et fonctionnel, Schott Bros devient fournisseur officiel des forces armées américaines. Schott a ainsi équipé l’armée américaine avec les bombers MA-1, les parkas N3-B, les blousons bombardier et les pea-coats pour l’US Navy. La marque a donc un double héritage : militaire et contre-culturel. Car après avoir fabriqué en plusieurs décennies des centaines de milliers de MA1 et de CWU pour le marché civil, on a en quelque sorte détourné leur usage original pour en faire de véritables références de la pop culture et de la mode. Ces pièces fonctionnelles et techniques sont devenues ainsi des icônes urbaines.

L’un des points forts de la griffe est le renouvellement constant.

En effet, l’un de nos vrais points forts, c’est qu’on ne s’arrête jamais. On a un héritage énorme, mais on refuse de rester figés dedans. Chaque saison, on revisite nos classiques, on teste de nouvelles matières, on ose des collaborations inattendues. C’est ce mélange entre fidélité à nos classiques et envie de surprendre qui fait que Schott reste toujours actuel. Le Perfecto® reste une pièce phare, mais chaque saison nous revisitons les archives. Cela passe par la coupe, les matières, les couleurs ou encore les collaborations. Autre exemple, sur la dernière collection Automne/Hiver 25-26 on a une gamme de nouveaux bombers avec des spécificités jamais vues auparavant, comme par exemple un blouson bombers avec sac à dos directement intégré au dos.

Votre recette pour « twister » les pièces  d’héritage ?

On a la chance d’avoir un trésor : des centaines voire des milliers de pièces d’archives qui racontent l’histoire de Schott. Quand on veut revisiter une pièce d’héritage, on commence toujours par là. On observe les détails, les coupes, les matières, puis on se demande : comment parler à la génération d’aujourd’hui avec ce vêtement ? Ça peut passer par les matières, les rendre plus actuelles, plus éco-responsables. Parfois, c’est la coupe qu’on modernise, plus ajustée ou au contraire oversize. Et puis il y a les couleurs : nos parkas ou nos bombers existent désormais dans des teintes inédites, loin du kaki ou du noir traditionnels. On aime aussi jouer avec les codes de la pop culture. Pour des collabs, on peut intégrer une référence musicale, un clin d’œil au cinéma, ou même un univers manga comme on l’a fait avec Naruto. Ça reste 100 % Schott, mais ça permet de créer une complicité avec le public d’aujourd’hui. En fait, twister l’héritage, c’est un équilibre : rester fidèle à l’ADN Schott, mais donner envie à quelqu’un de 20 ans de s’approprier une pièce qui existe depuis un siècle.

Comment envisagez-vous l’idée de « capsule » ?

Les collaborations, c’est essentiel pour nous. C’est à la fois un terrain créatif et un vecteur marketing majeur, qui permet de donner une visibilité toujours fraîche à la marque. Chaque collab’, qu’elle soit avec une grande maison de couture ou une marque plus niche, crée une histoire différente autour de Schott et attire de nouvelles audiences. Ce qui est intéressant aussi, c’est que la plupart du temps, ce sont les autres marques qui viennent à nous. Et ça, c’est une vraie fierté. Ça prouve que Schott n’est pas seulement une marque historique : on est perçus comme une référence, une pionnière dans la mode, avec un héritage fort et toujours actuel.

Quelques mots sur les « collabs » de prestige avec Saint Laurent et Jean-Paul Gaultier ?

Une grande fierté ! Quand Saint Laurent ou Jean-Paul Gaultier revisitent des iconiques de la marque Schott, c’est une consécration. Cela prouve que la pièce est devenue un symbole de la mode mondiale. Lorsque Jean Paul Gaultier a revisité notre classique Perfecto®, c’était un vrai hommage couture à l’ADN Schott, avec toute sa créativité débordante. Et également un clin d’oeil au premier défilé de JPG en 1976 qui avait déjà placé ce blouson. Saint Laurent, de son côté, a choisi d’interpréter plusieurs pièces iconiques : deux bombers, un teddy et une veste aviateur en respectant totalement l’ADN   visions différentes, mais qui prouvent à quel point nos pièces peuvent voyager entre la haute couture et le vestiaire du quotidien.

Sans oublier les « collabs » urbaines Eleven Paris, Walk in Paris  et Zapa ?

Avec Eleven Paris, Walk in Paris ou Zapa, nous nous adressons à une autre génération. Ce sont des marques plus jeunes, plus pop culture. Elles nous permettent notamment d’entrer dans un dialogue avec un public qui est moins aguerri sur l’histoire de la mode et qui ne connaît pas forcément le poids historique de Schott. La collab avec Walk in Paris est une vraie success story. On a revisité nos blousons aviateur avec leur touche urbaine, et les campagnes hyper visuelles et actuelles ont fait le reste. Résultat : un gros buzz, beaucoup de presse, et des jeunes qui ont découvert Schott en boutique grâce à cette énergie nouvelle.

Les partenariats avec des marques comme Jonak et Narcissique ont été, semble-t-il,  de vrais succès.

Avec Jonak, ce n’était pas un carton absolu mais une très belle collaboration. C’est une marque très dynamique, avec une vraie audience féminine, et c’était important pour nous de créer ce pont avec leur univers. Ça montre aussi que Schott sait dialoguer avec des marques parisiennes bien ancrées dans leur époque. Pour Narcissique, en revanche, grâce à son créateur et ambassadeur Prime, ça a explosé. Cette  marque née en 2021 est portée par Prime, rappeur et créateur suivi par des millions de fans. Il a su imposer très vite un style streetwear reconnaissable. Pour Schott, collaborer avec lui était cohérent : il parle directement à une génération ultra connectée, et la collab a été un carton commercial, avec des milliers de pièces vendues. On parle de milliers de doudounes vendues en très peu de temps. Un vrai carton commercial, et la preuve qu’en associant nos pièces iconiques à une personnalité qui parle directement à sa communauté, on peut créer un phénomène.

Plus surprenant encore les ponts établis par Schott avec le GP Explorer et des héros de manga tel que Naruto.

Oui, là on a surpris pas mal de monde ! Participer à un événement digital comme le GP Explorer (qui fait concourir des gros youtubeurs ou talents en formule 4) c’était une façon de montrer que Schott sait aussi parler à la génération Twitch et YouTube. On a retrouvé dans cette course d’influenceurs la même énergie que dans nos racines : l’audace, l’adrénaline, l’envie de casser les codes. Et avec Naruto, c’est une autre histoire : ce manga a marqué toute une génération. Associer notre bombers à cet univers, c’était créer un pont entre une icône de la pop culture japonaise et une icône du style américain. Sebastien Abdelhamid est le grand protagoniste de cette collaboration et le résultat a été incroyable : une vraie connexion émotionnelle avec un public qui ne s’y attendait pas.

L’été 2025 a été aussi riche en surprise.

Absolument. L’été 2025 a été particulier : tout le monde sait que le retail traverse une période compliquée, mais chez Schott, on a réussi à rester en croissance. Pourquoi ? Parce qu’on a une dynamique de marque hyper forte et cette image toujours cool qui parle aux jeunes comme aux plus fidèles. Nos campagnes ont très bien marché, et surtout nos collaborations ont créé la différence. On a osé des ponts inattendus : avec le restaurant d’origine sri lankaise Kolam, qui apporte une touche lifestyle et exotique ; avec le mangaka français Diamond Little Boy, qui a donné une vision graphique unique de nos pièces ; avec le film culte Fight Club, clin d’œil évident à l’esprit rebelle de Schott ; et enfin avec Von Dutch, une autre icône de la culture américaine. Résultat : beaucoup de buzz, des boutiques qui ont continué à bien tourner malgré un contexte difficile, et la confirmation que Schott reste une marque vivante, actuelle et désirable.

Que nous réservez vous de beau pour 2026 ?

Nous travaillons évidemment déjà sur 2026 mais pour le moment, c’est volontaire, je préfère rester mystérieux. Tant que rien n’est officiel, je garde le secret. En revanche, je peux d’ores et déjà annoncer que l’on va reconduire à nouveau notre partenariat avec Walk in Paris. Côté retail, on espère continuer à ouvrir des points de vente. Il faut poursuivre cette bonne dynamique qu’elle soit commerciale ou d’image ! Je commence également déjà à réfléchir à des activations pour le centenaire du Perfecto® qui arrive en 2028. Il est évident que Schott est un pilier dans l’univers de la mode et nous devons faire en sorte qu’elle le demeure.

www.schott-store.com