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India Hair : « J’ai un côté pas très parisien »

Dans le corrosif En même temps du tandem Kervern/Delépine, elle campe une féministe de choc pour ensuite endosser un rôle de médecin dans le sombre Sentinelle Sud face à Niels Schneider. En plein tournage de la série Polar Park, India Hair s’autorise une pause pour répondre aux questions d’Edgar.

Comment vit-on lorsqu’on porte un nom et prénom qui résonnent comme un titre de morceau de French Touch ?

Ça me fait plaisir ce que vous dites ! Je crois que ça n’a jamais été fait aussi gentiment. En général, les gens se moquent. D’habitude, on me demande si c’est un pseudonyme. Je réponds que jamais cela ne me serait venu à l’idée de m’appeler Inde Cheveux…

Comment présenter votre personnage dans En même temps ?

Mon personnage se nomme Élise, c’est une féministe. De par son activisme, elle va se transformer en Sandra, une hôtesse de bar, et jouer un vilain tour à deux hommes politiques incarnés par Jonathan Cohen et Vincent Macaigne.

 Quel fut le moment le plus amusant de ce tournage ?

J’ai ri dès la première scène en lisant le scénario. L’échange avec Yolande Moreau, je le trouve merveilleux. Ensuite, l’action féministe « centrale » du film, je la trouve particulièrement cocasse. Là aussi, ça m’a amusée. Et puis de pouvoir travailler avec deux autres actrices que j’aime énormément, Jehnny Beth et Doully. Je trouve que nous formons un trio de pensée et d’action féministes qui fonctionne très bien.

 Comment expliquez-vous l’intérêt grandissant des metteurs en scène pour vous ?

Pour moi ?! Euh… Gustave (Kervern), nous nous sommes retrouvés sur En Même temps après avoir travaillé ensemble sur le film Poissonsexe. Nous étions partenaires sur le film et nous étions très bien entendus. Sinon, je ne sais pas trop pourquoi les gens me choisissent ? Peut-être parce que j’ai un côté pas très parisien. Du coup, ça change un peu. Je ne sais pas trop…

 « Ce qui m’intéresse dans chaque projet, c’est de découvrir un artiste »

 Vous passez d’une comédie acerbe, En même temps, à un thriller très sombre, Sentinelle Sud. Le changement de registre, est-ce ce qui vous meut ?

J’adore ça ! Par exemple, l’univers de Gustave Kervern et de Benoît Delépine, je l’ai suivi tout en grandissant : Groland, Louise Michel, Mammuth… Et ensuite, voilà que je passe à Sentinelle Sud, un projet auquel je suis très attaché, avec une très belle écriture. En fait, ce qui m’intéresse dans chaque projet, c’est de découvrir un artiste. C’est un parcours du combattant de monter un film ! J’aime découvrir pourquoi c’est si important pour eux. J’adore lire, découvrir une écriture. Je me fais facilement des images lorsque je parcours un scénario. Après, il se peut que je me plante complètement, mais si ça m’emmène quelque part, c’est une belle motivation.

Scène du film Sentinelle Sud avec Niels Schneider

Avez-vous déjà été déçue par un de vos choix ?

Non, jamais. Au contraire, j’ai souvent été surprise, parfois même émue au-delà de ce que j’espérais. Et puis, je ne fais pas des rôles principaux. Il y a toujours une grande partie des films que je ne vois pas au moment du tournage. Je les découvre terminés avec toutes les autres scènes où je n’apparais pas. C’est toujours un moment magique.

Rêvez-vous de tête d’affiche ?

J’ai eu une fois un premier rôle dans Crash Test Aglaé avec Yolande Moreau et Julie Depardieu. J’ai adoré être là du début jusqu’à la fin du tournage, voir comment se fabrique entièrement une histoire, et être là en permanence, comme au théâtre. Vous avez plus de temps pour réfléchir au personnage avec le reste de l’équipe, le directeur artistique, tout ça… Par tout dire, des premiers rôles, on ne m’en propose pas ! (Rires)

Rongez-vous votre frein ?

Non, parce que je ne fais que des projets auxquels je tiens absolument. Je ne vais pas tourner dans un film qui ne me plaît pas. Finalement, je ne me questionne jamais sur le fait d’être un « second-rôle » : vous pouvez travailler sur un long-métrage cinq jours comme vous pouvez y rester vingt.

 Vous allez aussi apparaître à la télévision dans la série Des Gens bien

J’aime aussi beaucoup la télévision. Je suis en train de terminer la série Polar Park pour Arte. C’est ma troisième collaboration avec cette chaîne après Les Herbes hautes de Jérôme Bonnell et Des Gens bien, une série belge, qui, je crois, sortira l’année prochaine. En vérité, je ne fais pas trop la différence avec un tournage de long-métrage. Ce sont même, à chaque fois, des réalisateurs de cinéma qui se sont tournés vers la télévision. Ils ont un espace qu’ils apprécient. Et comme j’aime leur univers, naturellement, je les suis.

 « Je trouve que j’ai eu de la chance »

 Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier ?

De pouvoir ressentir des émotions très fortes. C’est ce dont je rêvais étant ado et qui j’ai concrétisé en faisant du théâtre. Aujourd’hui, j’aime les collaborations. Je n’apprécierais pas trop, je pense, faire un autre métier artistique. Mes parents sont sculpteurs et céramistes, arts qui se pratiquent très seul. Moi qui ne suis pas particulièrement extravertie et même un peu timide, j’aime échanger avec les autres sur un plateau, chercher ensemble la compréhension d’une séquence, les écouter. Et me retrouver face à des acteurs qui me passionnent.

Depuis le Conservatoire de Nantes, en 2007, les choses paraissent évoluer « facilement » pour vous…

Oui, je trouve que j’ai eu de la chance. Déjà, lorsque j’ai décidé d’être actrice, pour mes parents qui étaient artistes, ce n’était pas du tout une idée farfelue. J’ai grandi avec des mois où nous pouvions aller au restaurant et d’autres pas du tout. Mais, tous les jours, je les voyais se rendre à leur atelier. Une vie d’artiste, pour moi, ça n’a jamais été quelque chose d’abstrait.

 Et une nomination pour un César, est-ce quelque chose de concret ?

La première, en 2013, pour mon rôle dans Camille redouble, j’ai eu comme l’impression d’une imposture. Je ne comprenais pas. Mon rôle était trop petit. J’avais peur que les gens soient déçus. C’était trop inattendu pour pouvoir en profiter vraiment. Le bon côté des choses, c’est qu’ensuite les directeurs de casting savent mieux qui vous êtes. Cela devient plus facile d’accéder aux projets. Pour la seconde nomination, l’année dernière, avec Poissonsexe, ça m’a fait plaisir. J’étais plus mûre, plus calme. J’ai trouvé ça vraiment chouette.

Quelle serait votre ambition aujourd’hui ?

Vraiment garder en tête de ne faire des projets que s’ils me sont nécessaires. Et rester honnête avec moi-même. C’est un peu naïf, je suis désolée…

Photos © India Lange (portraits) et Chloé Carbonel (En même temps).

En même temps de Gustave Kervern et Benoît Delépine avec Jonathan Cohen, Vincent Macaigne, India Hair…
Sortie le 6 avril.
Sentinelle Sud de Mathieu Gérault avec Niels Schneider, India Hair, Sofian Khammes…
Sortie le 27 avril.